Le programme de soutien de l’économie en Tunisie

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, s’est rendu en Tunisie pour participer au premier cycle du Dialogue national sur l’emploi qui a rassemblé 270 représentants du gouvernement, des partis politiques, des syndicats, de la société civile et des experts. La participation du secrétaire général souligne l’importance internationale de la préservation des acquis démocratiques de la Tunisie, ainsi que l’espoir de l’ONU d’offrir à la Tunisie un modèle de réforme réussi pour la région.

Lors de la cérémonie de clôture du dialogue, Ban Ki-Moon a déclaré: «L’emploi représente l’estime de soi et la dignité. Les jeunes hommes et femmes qui sont exclus de l’emploi se retrouvent en difficulté, aliénés et séparés (de la société) au point où ils peuvent être vulnérables aux instances des extrémistes. Un sentiment d’urgence est palpable à mesure que l’ISIS multiplie ses attaques en Tunisie qui a eu lieu en mars dans la ville frontalière de Ben Guerdane, laissant 18 morts, dont sept civils.

Le Plan directeur à onze points issu du premier cycle du dialogue national est juste en soulignant l’importance du secteur public dans la promotion de la réforme. Cependant, de nombreux aspects de la réforme restent sans réponse dans le document.

  1. S’appuyant trop lourdement sur le secteur privé existant

Bien que les incitations à encourager l’investissement par le secteur privé conduisent à la création d’emplois, ce n’est peut-être pas le cas en Tunisie. En effet, il est important de comprendre la spécificité du tissu économique tunisien et de développer une stratégie ciblée. Des décennies de copinage ont entraîné une répartition très inégale de la richesse.

  1. Viser des numéros d’emploi sans viser des salaires équitables

En Tunisie, il est fréquent de voir un ouvrier qualifié occuper de nombreux emplois pour payer les factures. Le défi ici n’est pas seulement la rareté des emplois en général, mais le fait qu’une personne a souvent besoin de plus d’un emploi pour joindre les deux bouts. À moins que le gouvernement n’applique pas un salaire minimum décent, ses stratégies de création d’emplois ne seront pas efficaces pour sortir les gens de la pauvreté. En outre, il convient de réduire l’écart salarial entre les secteurs public et privé.

  1. Une concurrence sans entraves peut conduire à une faible croissance

Le Dialogue national a surtout souligné l’importance de la compétitivité sans définir quelle compétitivité ils ciblent. Sur le marché mondial, les entreprises tunisiennes doivent rivaliser avec les produits subventionnés et les produits européens. Alors que le gouvernement ne devrait pas nécessairement subventionner l’économie locale, il pourrait accorder la priorité aux biens et aux services tunisiens pour stimuler la production locale et la croissance de l’emploi. A leur avis, être compétitif signifie une réduction des coûts de production pour pouvoir vendre aux prix du marché mondial et générer des bénéfices. Cependant, la diminution des coûts de production entraîne une réduction des coûts de main-d’œuvre et une baisse des salaires et des avantages, c’est le scénario précis que la Tunisie souhaite éviter.

  1. L’application des lois du travail est une nécessité

La faiblesse de l’application des lois du travail existantes crée un environnement commercial toxique où les grandes entreprises peuvent exercer une pression sur les institutions publiques. En effet, les autorités locales et les organismes de réglementation préfèrent fermer les yeux sur les pratiques de travail illégales sous la menace de fermer et de licencier toute une main-d’œuvre.

  1. Comment faire face à l’économie informelle

Le dialogue national n’a pas abordé les implications de l’économie informelle sur l’emploi. L’économie informelle a fourni des opportunités économiques, des recettes, du carburant et des produits bon marché principalement de la Chine à la consommation locale. Il ne fait aucun doute que la situation des chômeurs aurait été bien pire sans l’existence d’un marché noir. Dans sa stratégie visant à freiner l’économie informelle, le gouvernement devra mesurer les répercussions d’une telle politique sur la population. Afin de ramener l’emploi sur le marché réglementé et les recettes de l’État, le gouvernement envisage de créer des zones exemptes d’impôt le long des frontières libyenne et algérienne. Cette stratégie sera incomplète car elle néglige le fait que le commerce informel existe en raison de la contrebande bon marché et des marchandises chinoises arrivant par les ports libyens et inondant le marché africain via la Tunisie.

  1. Les négociations sur l’Accord de libre-échange devraient être liées à la stratégie pour l’emploi

Le gouvernement négocie activement un accord de libre-échange avec l’Europe malgré l’absence d’évaluation de l’ancien accord commercial de 1995. Pour les entreprises tunisiennes, qui ne sont généralement pas concurrentielles, l’ouverture du marché avec l’Europe nécessite la réduction de coût de production. À la place des pays tiers, mais ils perdent encore davantage à mesure que le transfert des recettes fiscales diminue aussi. »

  1. Le Programme de création d’emplois devrait envisager la façon de financer son coût

Le plan ne fait aucune mention de la façon dont le gouvernement ne financera son programme de création d’emplois. Cela implique que le gouvernement continuera de s’appuyer sur des prêts conditionnés en devises lorsque la plupart des besoins de la Tunisie sont en dinars tunisiens. Malheureusement, la classe politique a hésité à réformer le modèle économique pré révolutionnaire qui est responsable de la richesse et de l’inégalité des revenus et des disparités régionales de développement.

La Tunisie devrait réformer son modèle économique pour explorer un modèle de croissance axé sur l’emploi et travailler avec les politiques fiscales et monétaires pour atteindre cet objectif. Un programme de «garantie d’emploi» où le gouvernement devient un «employeur de dernier recours» pourrait obtenir le plein emploi si la Banque centrale et le gouvernement travaillent de concert pour contrôler l’inflation. Un tel programme ne devrait pas forcément entraîner une bureaucratie gonflée, mais offrir davantage d’influence au gouvernement pour créer des marchés qui n’existent pas, comme celle de secteur de l’énergie solaire. Malheureusement, le mois dernier, les législateurs ont décidé de limiter ce modèle économique en approuvant un amendement qui interdit à la Banque centrale tunisienne d’acheter des obligations d’État.

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